Bonjours, pouvez-vous m'aider svp ?
Extrait de Guy de Maupassant "lui ?" :
J'entrai. Mon feu brûlait encore et éclairait même un peu l'appartement. Je pris une bougie pour aller l'allumer au foyer, lorsque, en jetant les yeux devant moi, j'aperçus quelqu'un assis dans mon fauteuil, et qui se chauffait les pieds en me tournant le dos.
Je n'eus pas peur, oh ! non, pas le moins du monde. Une supposition très vraisemblable me traversa l'esprit ; celle qu'un de mes amis était venu pour me voir. La concierge, prévenue par moi à ma sortie, avait dit que j'allais rentrer, avait prêté sa clef. Et toutes les circonstances de mon retour, en une seconde me revinrent à la pensée : le cordon tiré tout de suite, ma porte seulement poussée.
Mon ami, dont je ne voyais que les cheveux, s'était endormi devant mon feu en m'attendant, et je m'avançai pour le réveiller. Je le voyais parfaitement, un de ses bras pendant à droite ; ses pieds étaient croisés l'un sur l'autre ; sa tête, penchée un peu sur le côté gauche du fauteuil, indiquait bien le sommeil. Je me demandais : Qui est-ce ? On y voyait peu d'ailleurs dans la pièce. J'avançai la main pour lui toucher l'épaule !...
Je rencontrai le bois du siège ! Il n'y avait plus personne. Le fauteuil était vide !
Quel sursaut, miséricorde !
Je reculai d'abord comme si un danger terrible eût apparu devant moi.
Puis je me retournai, sentant quelqu'un derrière mon dos ; puis, aussitôt un impérieux besoin de revoir le fauteuil me fit pivoter encore une fois. Et je demeurai debout, haletant d'épouvante, tellement éperdu que je n'avais plus une pensée, prêt à tomber.
Mais je suis un homme de sang-froid, et tout de suite la raison me revint. Je songeai : "Je viens d'avoir une hallucination, voilà tout." Et je réfléchis immédiatement sur ce phénomène. La pensée va vite dans ces moments-là.
J'avais eu une hallucination - c'était là un fait incontestable. Or mon esprit était demeuré tout le temps lucide, fonctionnant régulièrement et logiquement. Il n'y avait donc aucun trouble du côté du cerveau. Les yeux seuls s'étaient trompés, avaient trompé ma pensée. Les yeux avaient eu une vision, une de ces visions qui font croire aux miracles les gens naïfs. C'était là un accident nerveux de l'appareil optique, rien de plus, un peu de congestion peut-être.
Et j'allumai ma bougie. Je m'aperçus, en me baissant vers le feu, que je tremblais, et je me relevai d'une secousse, comme si on m'eût touché par derrière.
Je n'étais point tranquille assurément.
Je fis quelques pas ; je parlai haut. Je chantai à mi-voix quelques refrains.
Puis je fermai la porte de ma chambre à double tour, et je me sentis un peu rassuré. Personne ne pouvait entrer, au moins.
Je m'assis encore et je réfléchis longtemps à mon aventure ; puis je me couchai, et je soufflai ma lumière.
Pendant quelques minutes, tout alla bien. Je restais sur le dos, assez paisiblement. Puis le besoin me vint de regarder dans ma chambre, et je me mis sur le côté.
Mon feu n'avait plus que deux ou trois tisons rouges qui éclairaient juste les pieds du fauteuil, et je crus revoir l'homme assis dessus.
Question :
1) Pourquoi cet épisode est-il effrayant ? Pourquoi le narrateur aura-t-il désormais toujours peur de la solitude ?
2) Identifiez les étapes du récit. Montrez l'alternance des événements angoissants et des tentatives du narrateur pour se rassurer.
3) Observez ce qui permet de mettre en évidence l'angoisse du narrateur : la longueur des paragraphes, les types de phrases, le lexique de la peur, les signes physiques qui la traduisent.
Merci d'avance !