D'après « L'action sanitaire, mythes et réalités », extrait de l'Atlas des empires
coloniaux de Jean-François Klein publié en 2012
La grande période coloniale du XIXe siècle correspond aussi au développement de
la médecine moderne. La médecine devient alors un outil incontournable de la
colonisation. Le médecin colonial a une triple mission politique (montrer la
supériorité de la médecine des colonisateurs), économique (augmenter et fortifier
la main-d'œuvre indigène) et humanitaire. La France insiste énormément sur la
dimension << civilisatrice » donc l'action sanitaire est un grand thème de
propagande coloniale. Des colonisés sont formés et font des carrières dans la
médecine mais on ne leur autorise que des postes subalternes (infirmiers, sages-
femmes,...). Parmi les colons, des individus passionnés s'investissent au service des
malades. On compte parmi eux Eugène Jamot qui lutte contre la trypanosomiase
[une maladie mortelle] au Cameroun et en AEF en lançant des équipes mobiles qui
dépistent, examinent et soignent des dizaines de milliers de personnes infectées
ou Alexandre Yersin qui identifie le virus de la Peste en 1894 à Hong Kong et
fonde avec Albert Calmette en Indochine les premiers instituts Pasteur. Dans ces
instituts des vaccinations de masse sont organisées. Cependant, ces pratiques
médicales européennes sont imposées aux colonisés sans tenir compte de leurs
pratiques médicales et de leurs connaissances. Elles participent à imposer une
science européenne et à désorganiser les structures sociales et politiques des
habitants. De plus, la priorité des autorités est surtout de soigner les soldats
européens car dans les années 1870, 26 % des officiers dans les colonies meurent
de maladie et seulement 6 % sont tués au combat. Enfin, malgré le travail de ces
médecins qui soignent dans les colonies, les faibles budgets ne permettent pas de
progrès considérables. La couverture médicale reste largement insuffisante et
inégalement répartie : à la fin des années 1930 on compte un médecin pour 10 000
personnes à Madagascar, un pour 100 000 au Cambodge alors qu'il y en avait un
pour 2000 en France. Entre idéalisme scientifique ou humanitaire, exploitation
économique et discrimination coloniale, la frontière reste floue.
1. Quel est le sujet de ce texte ?
2. Relève un médecin colonial et son action.
3. Les colonisés pouvaient-ils devenir médecin ? Justifie.
4. Montre que c'est un exemple de « mission civilisatrice ».
5. Explique quel rapport cette action sanitaire a avec l'économie et l'exploitation
des ressources.
6. Quelle était la priorité des médecins dans les colonie?