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Sagot :
Réponse :
Explications :
I. LE POÈTE, ATTENTIF AU MONDE, LE « VOIT » DIFFÉREMMENT
1. Le poète puise ses sujets dans le monde qui l’entoure
Délaissant les exploits épiques, la célébration des dieux ou les voyages vers des mondes exotiques ou rêvés, le poète s’inspire de la réalité ordinaire où il vit : il s’empare d’objets et de lieux familiers comme Francis Ponge qui, dans Le Parti pris des choses, s’intéresse au pain ou à un cageot ; il s’attache aux phases obligées de la vie humaine (Ronsard se peint proche de la mort dans « Je n’ai plus que les os… ») ; il observe la réalité sociale dans sa banalité (dans « Melancholia », Hugo décrit le travail quotidien des enfants au xixe siècle). Le poète Blaise Cendrars résume cette attention que le poète porte au monde quotidien par une jolie métaphore : « Je ne trempe pas ma plume dans un encrier mais dans la vie. »
2. Mais il le voit différemment
Son regard n’est pas superficiel. Le poète regarde le monde en artiste, grâce à la mobilisation de ses sens, de ses émotions et de sa sensibilité. Baudelaire, qui a aussi été un éminent critique de peinture (l’un de ses poèmes s’intitule « Le Désir de peindre »), insiste sur l’importance du regard dans la poésie ; le poète Jean Cocteau (1889-1963) dans Le Rappel à l’ordre, paru en 1926, décrit sa propre conception de la poésie qui montre « nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement. » Le poète se réapproprie les objets ou les moments de la vie quotidienne et les redynamise, les montre sous un aspect nouveau, inattendu. Selon l’anecdote imagée de R. Caillois un aveugle, s’il est poète, n’écrit pas sur sa pancarte un banal « Aveugle de naissance » mais : « Le printemps va venir, je ne le verrai pas »…
II. LE POÈTE « VOYANT », « DÉCHIFFREUR » DE LA RÉALITÉ PROFONDE
Le poète réussit ainsi non seulement à voir et décrire différemment le monde, mais plus que cela : il en pénètre la réalité profonde et en perce les mystères. « Déchiffreur », il propose au lecteur un voyage au cœur de la réalité.
1. Le regard du poète « redynamise » le monde
Le poète fait voir au lecteur le connu sous la forme de l’inconnu, « ce sur quoi son cœur, son œil glissent chaque jour, sous un angle et une vitesse tels qu’il lui paraît le voir et s’en émouvoir pour la première fois ». C’est cette fonction créatrice que Mallarmé assigne à la poésie, quand il affirme qu’évoquer une fleur dans un poème, c’est non seulement en parler, mais façonner par la magie du langage un objet nouveau : « Je dis, une fleur ! et hors de l’oubli où ma voix relègue aucun contour […] musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tout bouquet. » La poésie posséderait donc un pouvoir d’évocation propre pour atteindre l’essence même des objets, les dégager de leur existence triviale.
2. Le poète « voyant » « dévoile » les mystères du monde
La poésie, parce que le poète est « voyant », permet au lecteur de deviner le monde insoupçonné qui se cache derrière le mur de la réalité quotidienne. La poésie devient alors un mode de connaissance plus approfondi du monde. Baudelaire, dans « Correspondances », traduit par un jeu d’images et de synesthésies les liens invisibles du monde caché et les sensations que l’on ne saurait exprimer :
Le lecteur peut ainsi se rapprocher de la réalité de manière peu habituelle et dialoguer avec les éléments qui la composent, comme dans « Élévation » où le même Baudelaire affirme que la poésie permet de comprendre « Le langage des fleurs et des choses muettes ».
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