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que propose le Bret a Cyrano aux vers14-15? Cyrano accepte t-il cette propositions ?quelle raison invoque t-il

CYRANO, avec un rire amer
Que j’aimasse ?…
(Changement de ton et gravement.)
J’aime.

LE BRET
Et peut-on savoir ? Tu ne m’a jamais dit ?…

CYRANO
Qui j’aime ?… Réfléchis, voyons. Il m’interdit
Le rêve d’être aimé même par une laide,
Ce nez qui d’un quart d’heure en tous lieux me précède ;
Alors moi, j’aime qui ?… Mais cela va de soi !
J’aime — mais c’est forcé ! — la plus belle qui soit !

LE BRET
La plus belle ?…

CYRANO
Tout simplement, qui soit au monde !
La plus brillante, la plus fine,
(Avec accablement)
La plus blonde !

LE BRET
Eh, mon Dieu, quelle est donc cette femme ?…

CYRANO
Un danger
Mortel sans le vouloir, exquis sans y songer,
Un piège de nature, une rose muscade
Dans laquelle l’amour se tient en embuscade !
Qui connaît son sourire a connu le parfait.
Elle fait de la grâce avec rien, elle fait
Tenir tout le divin dans un geste quelconque,
Et tu ne saurais pas, Vénus*, monter en conque*,
Ni toi, Diane*, marcher dans les grands bois fleuris,
Comme elle monte en chaise et marche dans Paris !…





LE BRET
Sapristi ! Je comprends. C’est clair !


CYRANO
C’est diaphane.

LE BRET
Madeleine Robin, ta cousine !

CYRANO
Oui, — Roxane.

LE BRET
Eh bien ! mais c’est au mieux ! Tu l’aimes ? Dis-le-lui !
Tu t’es couvert de gloire à ses yeux aujourd’hui !

CYRANO
Regarde-moi, mon cher, et dis quelle espérance
Pourrait bien me laisser cette protubérance* !
Oh ! je ne me fais pas d’illusions ! — Parbleu,
Oui, quelquefois, je m’attendris, dans le soir bleu ;
J’entre en quelque jardin où l’heure se parfume ;
Avec mon pauvre grand diable de nez je hume*
L’avril, — je suis des yeux, sous un rayon d’argent,
Au bras d’un cavalier, quelque femme, en songeant
Que pour marcher, à petits pas, dans de la lune,
Aussi moi j’aimerais au bras en avoir une,
Je m’exalte, j’oublie… et j’aperçois soudain
L’ombre de mon profil sur le mur du jardin !

LE BRET, ému
Mon ami !…

CYRANO
Mon ami, j’ai de mauvaises heures !
De me sentir si laid, parfois, tout seul…

LE BRET, vivement, lui prenant la main
Tu pleures ?

CYRANO
Ah ! non, cela, jamais ! Non, ce serait trop laid,
Si le long de ce nez une larme coulait !