Ne te dis jamais philosophe, ne parle pas abondamment, devant les profanes,
des principes de la philosophie; mais agis selon ces principes. Par exemple,
dans un banquet, ne dis pas comment il faut manger, mais mange comme il
faut. Souviens-toi en effet que Socrate était à ce point dépouillé de pédantisme
que, si des
gens venaient à lui pour qu'il les présente à des philosophes, il les
conduisait lui-même¹; tant il acceptait d'être dédaigné.
Et si, dans une réunion de profanes, la conversation tombe sur quelque
principe philosophique, garde le silence tant que tu le peux; car le risque est
grand que tu ne recraches trop vite ce que tu n'as pas digéré. Alors si quelqu'un
te dit que
tu es un ignorant et que tu n'en es pas meurtri, sache que tu com-
mences à être philosophe. Car ce n'est pas en donnant de l'herbe aux bergers
que les brebis montrent qu'elles ont bien mangé, mais en digérant leur nourri-
ture au-dedans et en fournissant au-dehors de la laine et du lait. Toi non plus
donc, ne montre pas aux gens les principes de la philosophie, mais digère-les et
montre les œuvres qu'ils produisent.
Epictète, Manuel (vers-100 ap. J.-C.), traduction de R. Létoquard, Éd. Hatier, 1988.
QUESTIONS
1) demandez-vous comment l’auteur expose ce qu’il dit ?
2) S’il analyse, déduit, construit un raisonnement par l’absurde
3) S’il tire une conclusion